dimanche 28 novembre 2010

Des dérapages... (part I)


Il est aussi souvent l'occasion pour les hommes politiques de faire parler d'eux, de façon scandaleuse, puis de clamer leur innocence, leur bonne foi, voire (plus vicieux encore) la mauvaise foi de leurs détracteurs en feignant le malentendu.
Et comme le bonbon aux deux effets, d'engranger (électoralement parlant) la sympathie de ceux qui ne pensent pas que ce qui a été dit soit scandaleux.

Voyons ensemble quelques exemples, plus ou moins récents, mais tous très symptomatiques de cette mode.

Nous pourrions nous référer à celui qui deviendra Président de la République:

Tout y est: la caricature, l'outrance ("3 ou 4 épouses"; "une vingtaine de gosses"; "sans naturellement travailler") et enfin l'injure ("le bruit et l'odeur") (1).

Moment pénible pour le débat politique, avec un RPR qui en 1991 refuse toujours de s'allier avec le Front National de Jean-Marie Le Pen, mais qui vient -ouvertement, et c'est une première- braconner sur ses terres.  Après la cohabitation de 1986-1988, la perte de l'élection présidentielle de 1988 et l'émergence de courants "dissidents" au sein de la famille gaulliste, parmi eux les "rénovateurs": Carignon, Noir, Million, d'Aubert, Bayrou,... représentants les "jeunes" quadras (2) aux dents longues, la "maison brûle".
Il n'est bien évidemment pas question ici d'excuser, mais de comprendre.

Le dérapage permet aux hommes politiques d'avancer dans le marécage nauséeux d'idées populistes, démagogues ou xénophobes (parfois tout à la fois), tout en se réservant le droit de répondre/se défendre en invoquant soit:
- le malentendu;
- le bon sens bien de chez nous (phrase classique "je dis tout haut ce que tout le monde pense tout bas");
- la mauvaise foi de ses critiques (ce n'est pas ce que j'ai voulu dire) et l'instrumentalisation.

Tout ceci participe, hélas, à la lepénisation des esprits...  mais nous aurons l'occasion d'en reparler.

Quelques mois plus tard, Valery Giscard d'Estaing, ancien Président de la République, parle d'invasion.

Car dans la course au dérapage, il convient de ne pas être distancé...



(1) la postérité retient "le bruit et l'odeur", mais d'autres phrases tout aussi choquantes « Notre problème, ce n'est pas les étrangers, c'est qu'il y a overdose. C'est peut-être vrai qu'il n'y a pas plus d'étrangers qu'avant la guerre, mais ce n'est pas les mêmes et ça fait une différence. Il est certain que d'avoir des Espagnols, des Polonais et des Portugais travaillant chez nous, ça pose moins de problèmes que d'avoir des musulmans et des Noirs " qui préfigure tristement l'atmosphère actuelle.
(2) voir ici pour la période concernée.

dimanche 7 mars 2010

Du "Ghost work"

Le "Ghost Work" est un concept qui prend de plus en plus d'ampleur, même si le mot lui-même est peu connu.  Qu'est-ce donc?

On peut traduire "ghost work" (travail fantôme en français) par la définition suivante: "le travail autrefois dévolu à un employé "parti" -le plus souvent licencié- mais qui désormais se retrouve effectué par un collègue restant; le collègue restant se trouvant (sur)chargé car ce surcroît de travail se fait en plus de son travail initial. (1)

Un concept qui fait florès dans le monde du travail actuellement.
En fait, cette notion anglo saxonne est une conséquence observée, celle des licenciements successifs dans une entreprise.
Ce n'est, semble-t'il, pas une volonté délibérée ou une stratégie.

Les employés restants écopent du travail des salariés qui sont "allés relever d'autres challenges".
"Ecoper" est le mot juste, car en général ils n'ont ni la compétence, ni l'expérience pour accomplir leurs nouvelles tâches en plus de celles pour lesquelles ils sont payés (et le plus souvent formés).

Ainsi on peut suppléer au départ d'employés "invités à poursuivre leur carrière ailleurs" sans embauches nouvelles et sans coût nouveau, hors la déperdition de connaissance (ce fameux "knowledge" dont tout le petit monde du management se gargarisait à la fin des années 90 et dont tout le monde semble désormais se moquer) et hors baisse de productivité (2).

Bien sûr, cela a un coût humain, mais tel l'homme qui chute "pour l'instant ça va"...


(1) on peut trouver d'autres définitions et exemples sur ce lien qui attribue la paternité de cette définition à Hamilton Beazley dans Continuity Management.
(2) D'autres effets secondaires ici.

vendredi 19 février 2010

être responsable...

"c'est connaître la honte en face d'une misère qui semblait ne pas dépendre de soi. C'est être fier d'une victoire que les camarades ont remportée. C'est sentir en posant sa pierre que l'on contribue à bâtir le monde." (Terre des hommes, A. de Saint-Exupéry)

Amusant et assez symptomatique de la période actuelle: le déni de responsabilité.

Un exemple parmi tant d'autres. Mais que fait Bruce Toussaint? que fait ce présentateur qui s'est fourvoyé hier en rapportant comme argent comptant que la Roumanie avait envoyé à Tahiti des hommes et de l'aide en lieu et place d'Haïti, sans s'apercevoir que cette fausse nouvelle était en fait un canular?
Rien.

Il explique gentiment et avec très peu de contrition que c'est comme ça, ça arrive.
D'autres s'y sont trompés. La preuve, une télé Colombienne a bien rapporté la nouvelle. Des médias innombrables (lesquels?) ont fait de même. Et puis, elle était belle l'histoire!
Pensez, des Roumains (y sont cons les Roumains!) vont à Tahiti au lieu d'Haïti! ouarf! ouarf!
Ils peuvent toujours l'attendre leur aide, les Haïtiens! Raah, la honte!
On allait pas se priver d'une bonne tranche de rigolade sur le dos des soldats roumains (sans doute de la 7ème compagnie?).
L'occasion était trop belle! Et puis, les roumains, franchement...

Sauf que voilà, Courrier International, d'où la fine équipe de Canal a extirpé cette information précise bien qu'il s'agit d'un canular... à la fin de la brève que cet excellent journal y consacre. Bon, alors, s'il faut lire les brèves jusqu'à la fin aussi!...

Alors, rien. Pas d'excuses, pas de mea culpa. "ça arrive..."

On sent bien derrière son sourire gêné qu'il n'est pas fier, mais bon... à quoi bon s'excuser? cette erreur, d'autres l'ont faites! un mauvais moment à passer. Le flot continu des actualités effacera bien cela, d'autres brèves viendront égayer les rieurs.

Ainsi de la vision du journaliste, du journalisme et de sa responsabilité.

Mais qui peut l'en blâmer?

La mode du "responsable, mais pas coupable" a de beaux jours devant elle...





samedi 13 février 2010

Pour l'instant, beaucoup sur rien...